oeuvres présentées
Vivre une vie à 7500 euros le mètre carré ou à 1800 euro par mois de loyer c’est possible. L’air de Paris se vend au mètre cube mais ce n’est pas un effet de la ségrégation, ce n’est pas une forme d’exclusion, c’est juste que la terre sur laquelle nous marchons a changé de valeur et nos vies avec elle.
Nous n’avions rien demandé, pourtant avons reçu les expulsions et les démolitions des bâtiments qui encore gardaient nos traces, et notre odeur, nous avions construit dans les lieux que personne n’habitait des espaces pour être ensemble et ils ont été rasés. Des espaces sans prix pendant quelques années, pour toutes les personnes qui s’y sentaient invitées, ça paraît peu mais c’est inestimable. Parce qu’on avait terriblement besoin de vivre loin des sols en parquet et tomettes d’origine, des cheminées avec miroirs et moulures, des vues dégagées ou des fenêtres sur verdure.
On se rappelle que notre première maison est notre corps et que ses habitants sont nos pensées et nos amours. On se souvient que la vie n’a pas de prix et que les lieux où elle prend place ne doivent pas en avoir non plus.
Que les rues et les immeubles sont là parce qu’il font partie d’un monde où il y a l’argent, mais il y a aussi le sang, la pensée, l’enfance, la solitude et la maladie. Où il y a le besoin d’argent, mais il y a aussi le besoin d’amour, le travail fait par passion, l’urgence d’être ensemble.
L’espace nous oublie. L’espace se peuple de signes avant-coureurs d’une nouvelle sécheresse. On achète un morceau de Paris, on le ferme à double tour, on passe deux portails avec digicode et une loge de gardien et on n’y fait rien qu’on ne pourrait pas faire ailleurs. On va le remplir de meubles de brocante repeints en couleurs pastel, de rideaux à perles colorés devant l’entrée de la cuisine, on mettra un tapis dans le salon, des orchidées dans des pots blancs et des guirlandes colorées et autour de la glace sur la cheminée. On aura des fruits frais dans un grand bol dans la cuisine, des plantes vertes dans le salon, un beau canapé lit et des chambres à coucher peintes en bleu clair. On va monter les marches en bois avec leur tapis rouge avant d’enfoncer la clé dans la porte et de comprendre qu’on s’est trompé. Que celui-ci n’est pas le présent et ne peux pas être le futur. Que dans ce fragment de Paris il n’y a la place pour personne. Que nous sommes, pendant qu’on se pose sur le garde corps ancien de la fenêtre pour fumer une cigarette en contrôlant notre portable, irrémédiablement seuls et qu’il est trop tard. Car une vie à 7500 euro le mètre carré n’est pas une vie innocente, elle n’est pas une vie accessible, elle n’est pas une vie ouverte, libre, aventureuse et intéressante. C’est une vie privée.
Claire Fontaine
Air de Paris est heureuse d'annoncer la seconde exposition personnelle de Claire Fontaine.
Claire Fontaine est une artiste collective, fondé en 2004 et vit à Paris. Après avoir tiré son nom d'une marque populaire de cahiers pour écoliers, Claire Fontaine s'est auto-déclarée une « artiste ready-made ».
En 2011, le MUSAC de Castilla y Léon (Espagne) lui consacrera une exposition personnelle. Des expositions monographiques lui ont été récemment consacrées au MOCA de Miami et au Museo Tamayo de Mexico en 2010, et, en 2009, à l’Aspen Art Museum. Une monographie de référence sur son œuvre est à paraître aux éditions Walther Koenig.
CLAIRE FONTAINE
No Family Life
11 Feb-19 March 2011
presented artworks
Living a life at 7500 € per square metre or 1800 € rent a month is possible. Paris air is on sale by the cubic metre, but this isn't an effect of social segregation, it isn't a form of exclusion – it's just that the value of the ground under our feet has changed, and our lives with it.
We didn’t ask for anything, but have received expulsions and demolitions of the buildings that were still bearing our traces and our smell. We had built, in places where no one lived, spaces for being together and they were razed to the ground, priceless spaces for a few years, open to everyone who felt welcome; it doesn't sound like much, but it's inestimable. Because we terribly needed to live far from parquet and authentic terracotta floors, far from fireplaces with mirrors and cornices, far from panoramic views and greenery outside the window.
We remember that our first home is our body and that its inhabitants are our thoughts and our loves. We remember that life doesn’t have a price, and the places where it happens mustn’t have one either.
We remember that streets and apartment buildings are there because they are part of a world in which there is money– but there’s also blood, thoughts, childhood, solitude and illness. A world in which there is a need for money – but also a need for love, work done passionately, the urgency of being together.
Space forgets us. Space is crowded with precursory signs of a new drought. We buy a fragment of Paris, we double-lock it, we go through two doors with access codes, and a caretaker's lodge, and we do nothing there that we couldn't do elsewhere. We are going to fill it up with secondhand furniture painted pastel colours, we will put a coloured bead curtain in the kitchen doorway, a rug in the living-room, orchids in white pots and coloured lights around the mirror over the fireplace. We will have a bowls with fresh fruits in the kitchen, green plants in the living room, a beautiful bed-couch and bedrooms painted in clear blue. We are going to climb the wooden stairs with their red carpet before we stick our key in the lock and realise that we were wrong. We realise that this is not the present and can't be the future. That in this fragment of Paris there is no room for anybody. We realise – as we lean on the antique railing of the window to smoke a cigarette and check our cell phone – that we are irreparably alone and that it is too late. For a life at 7500 € per square metre is not an innocent life, it isn't an accessible life, it isn't an open, free, adventurous, interesting life. It is a private life.
Claire Fontaine
Air de Paris is very pleased to announce Claire Fontaine’s second solo show.
Claire Fontaine is a Paris-based collective artist, founded in 2004. After lifting her name from a popular brand of school notebooks, Claire Fontaine declared herself a "readymade artist".
In 2011 Castilla y Leon (Spain) will dedicate a solo exhibition to Claire Fontaine. Her work has recently been the subject of solo exhibitions at the MOCA, Miami and at the Museo, Mexico in 2010, and, in 2009, at the Aspen Art Museum. A reference monograph will be published soon at Walther Koenig Verlag.