September 8 - October 26
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Mïrka Lugosi, Attitude, 2024. Photography, print on paper, frame, 22,2 x 31,4 cm. Edition 1/3 + 1 AP. © Photo DR
It’s About You
«When flying in the air, I really feel free. On the other hand I’m bound with rope to the center of something» (1) - Asagi Ageha
1983, née Mirka Lugosi. Au début, c’est une identité fictive pour signer les images produites pour les médias et une presse féminine plutôt conservatrice - Cosmopolitan ou Marie-Claire notamment. Et puis, rapidement, elle se présente sous ce nom et signe avec son travail artistique. Elle illustre les textes érotiques de l’écrivain symboliste Pierre Louÿs et participe activement à la scène électro-bruitiste française. Elle est membre du groupe Entre Vifs fondé par les artistes Zorïn et Ruelgo dans les années 80. Elle y explore les enjeux de la sculpture sonore et de l’improvisation collective en circuit. Sur scène, elle active des objets, joue sur une grille de frigo avec une brosse métallique, manipule des éclateurs en hurlant. C’est l’époque des angles affutés, des couleurs saturées, Nina Childress participe à la fondation du groupe Lucrate Milk et Cosey Fanni Tutti quitte Throbbing Gristle afin de voler de ses propres ailes. Lydia Lunch tourne avec Teenage Jesus and the Jerks, Atomic de Blondie passe sur les radios françaises et L’Empire des sens de Nagisa Ōshima est rejoué dans les salles d’art et d’essai. Mirka, elle, performe en femme-cyborg et s’invente ce nom dont elle aime la musicalité. Il possède des connotations ténébreuses empreintes d’ambiguïtés sexuelles : Mirka, en référence à l’héroïne Carmilla, de la nouvelle au titre éponyme publiée en 1872 par l’auteur irlandaise Sheridan Le Fanu; Lugosi, en référence à l’acteur Béla Lugosi connu pour ses incarnations du comte de Dracula immortalisées par Tod Browning en 1931.
Elle commence ainsi sa collaboration avec le photographe Gilles Berquet. Elle pratique la contrainte de la pose et devient ainsi travailleuse du sexe sans revendiquer de place particulière sur la scène fétichiste (2). Et cependant… son expérience de la sujétion est encore un moteur de création revendiqué par l’artiste comme le montre la série Les expérimentales. Mirka y développe tout un vocabulaire féministe queer lié à la question de l’activation du plaisir, de l’autonomie, du jeu avec des instruments. Comme toujours, elle représente des femmes dans des mondes sans hommes, occupées et stimulées par ce qu’elles font. Concentrées, elles sont agissantes sur la matière et improductives. Elles vivent des expériences uniques dans les espaces très privés de l’imaginaire et de la créativité - c’est pourquoi ils sont érotiques. Pour Lugosi, ces femmes s’exercent et ont du pouvoir sur ce qu’elles font. Elle dessine les espace-temps enveloppant qu’elles possèdent, dans lesquels elles sont comme métaphysiquement suspendues. Et ici, il n’y pas d’intrusion.
Utopie ou maîtresse?
Je pencherais pour la deuxième hypothèse car l’attitude des protagonistes, leurs looks science-fiction de l’entre-deux-guerre ou comics nord-américains, ainsi que la dimension performative de leurs actions, évoquent ces espaces d’émancipation autonomes où s’exercent les limites élastiques de la liberté. Asagi Ageha en parle comme d’une expérience en réalité, c’est-à-dire enchâssée dans un réseau de dépendances matérielles aux effets émancipateurs bien réels sur le corps et l’imaginaire. Les expérimentales, comme elle, dissolvent les chaînes avec la complicité des objets.
Marie Canet
(1) Dans la vidéo d’Hito Steyerl Lovely Andrea (2008), Asagi Ageha, accompagne l’artiste dans sa recherche au Japon. Elle explique durant un court passage son addiction à la pratique de l’auto-suspension en raison de l’expérience qu’elle y fait de la liberté.
(2) Mirka Lugosi a été modèle vivant à plein temps dans une école d’art. Elle explique avoir appris le dessin en regardant les étudiants la dessiner. Les heures de travail et la tenue de poses compliquées lui ont permis d’expérimenter pour la première fois une sorte d’état d’excitation mental due à l’endurance demandée et aussi au fait qu’elle soit nue au milieu de personnes habillées.
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
© Photo Marc Domage
Mïrka Lugosi, Institut Lugosi (bureau), 2024. Assemblage: desk and stool - metal, glass, wood; wood pencil; Stiletto, graphite pencil; gouache on paper, frame, variable dimensions. Unique. © Photo Marc Domage
It’s About You
«When flying in the air, I really feel free. On the other hand I’m bound with rope to the center of something» (1) - Asagi Ageha
Mirka Lugosi was born in 1983. At first, this fictitious identity was used to sign images produced for the media and rather conservative women’s magazines, including Cosmopolitan or Marie-Claire. But soon, the artist went by this name, using it to sign her work. She illustrated the erotic texts by symbolist writer Pierre Louÿs and played an active role in the French electro-noise scene. She was a member of the group Entre Vifs, founded by artists Zorïn and Ruelgo in the 1980s, in which she explored the stakes of sound sculpture and collective loop improvisation. On stage, she activated objects, playing on a fridge shelf with a wire brush, or handling spark gaps while yelling. This was the time of sharp edges and saturated colours. Nina Childress had co-founded the band Lucrate Milk and Cosey Fanni Tutti had left Throbbing Gristle to strike out on her own. Lydia Lunch was touring with Teenage Jesus and the Jerks, Blondie’s Atomic was playing on French radio and Nagisa Ōshima’s In the Realm of the Senses was being screened again in art-house cinemas. As for Mirka, she was performing as a cyborg-woman, inventing this name whose musicality she liked. It carried dark connotations imbued with sexual ambiguity: Mirka, in reference to Carmilla, the heroine of the eponymous short story pub-lished in 1872 by the Irish author Sheridan Le Fanu; Lugosi, in reference to the actor Béla Lugosi, known for his performance of Count Dracula immortalised by Tod Browning in 1931.
That’s when she began her collaboration with photographer Gilles Berquet. She experienced the constraints of posing and thus became a sex worker without claiming a particular place on the fetishist scene (2). And yet, her experience of submission has remained a creative driving force that is claimed by the artist, as revealed by the series Les expérimentales. The latter develops a whole queer feminist vocabulary tied to the issue of activating pleasure, autonomy and playing with instruments. As always, she depicts, in manless worlds, women who are busy and stimulated by what they are doing . Focused, these women are unproductive and have agency in the material world. They live unique ex-periences in the very private spaces of imagination and creativity — which is why these spaces are erotic. For Lugosi, these practicing women have control over what they are doing. She draws their enveloping spacetime, in which they seem to be metaphysically suspended. And here, there is no intrusion.
Utopia or mistress?
I would go for the second assumption, because the characters’ attitude, their interwar Sci-Fi or North American comics looks, as well as the performative dimension of their actions, recall these spaces of self-determined emancipation, wherein the elastic limits of freedom are exercised.
Asagi Ageha describes it as an experience of reality, that is, being embedded in a network of material dependency with very real emancipatory effects on the body and the imagination. Like her, Les expérimentales, dissolve chains with the help of objects.
Marie Canet
Translated by Callisto McNulty
(1) In Hito Steyerl’s video Lovely Andrea (2008), Asagi Ageha accompanies the artist who is pursuing her research in Japan. In a short excerpt she talks about her addiction to the practice of self-suspension and the freedom she experiences from it.
(2) Mirka Lugosi was a full-time model in an art school. She explains that she learned to draw by watching the students drawing her. The hours of work and the complicated poses allowed her to experience for the first time a state of mental excitement due to the stamina required and also to the fact that she was naked among people who were dressed.
Mïrka Lugosi, Institut Lugosi, 2022. Graphite pencil, coloured pencil and gouache on paper, framed, 35 x 50 cm. Unique. © Photo Gilles Berquet / ADAGP
Mïrka LUGOSI
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