Si la pornographie pût un temps être considérée, pensée ou vécue comme révolutionnaire elle est aujourd'hui diluée dans la marchandise et subie non plus comme confusion des sens mais indifférenciation du sens. La pornographie, c'est le monde environnant, le martelage des représentations abêtissantes et d'apparence joyeuses, l'incitation permanente à la fête consommatrice. Alors quand Sturtevant reprend intégralement une vidéo publicitaire, qu'elle présente sur un papier peint joliment composé, ça tue
« Une exposition de Sturtevant est toujours un événement. Un événement qui rouvre la question de la représentation, qui la déchaîne. L’ouverture d’un espace à double fonds : le double du langage, de l’œuvre et de sa réplique.
Mais ce qui intéresse encore davantage Sturtevant dans cet âge numérique, c’est le renversement des valeurs, des hiérarchies de la réalité et de ses représentations. Mes pièces, dit Sturtevant : «reflètent notre cybermonde d’excès, d’entraves, de transgression et de dilapidation». «Autrefois, la force supérieure, c’était celle du savoir, de l’intelligence, de la vérité. Aujourd’hui, la force supérieure, c’est haïr, tuer tandis que le masque de la vérité recouvre le pouvoir dangereux du mensonge».
La dernière partie de la production de Sturtevant regarde frontalement cette violence totalisante, la fascination exercée par ces réalités miroitantes. Elle a préfiguré ce virage de l’art, devenu un segment de la culture, embarqué tout entier dans l’ambiance aveugle et brillante des simulacres, l’art n’étant plus un espace de production, mais une bande de lecture, bande de codage et de décodage, bande magnétisée par les signes. Elle a vu venir le devenir-machine reproductrice de Warhol, le vertige de ces signes sériels, sans contrefaçon, sans sublimation possible, immanents dans leur répétition, cet univers cool de la digitalité, qui absorbe les réalités sans pouvoir les refouler. »¹
Pendant plus de vingt ans, Sturtevant a vécu et travaillé à Paris, elle nous a quitté en 2014. Sa première exposition à Air de Paris eu lieu en 1998 et s'intitulait "Ça va aller", la seconde "Blow Job" en 2009. Elle est l'une des artistes les plus influentes du XXè siècle et reçu en 2011, le Lion d’Or à la Biennale de Venise pour l’ensemble de son œuvre.
Elle a bénéficié de nombreuses expositions rétrospectives dont récemment la superbe STURTEVANT STURTEVANT au Madre, Naples ainsi que Double Trouble au Museum of Contemporary Art, Los Angeles, ainsi que Sturtevant : Double Trouble, Museum of Modern Art, New York. The House of Horrors (The Ghost Train) fait partie de la collection du Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris.
1- Stéphanie Moisdon, extraits de : Sturtevant Sturtevant, 2015.
Picture credits:
STURTEVANT STUPIDITY - 2013 - still from a digital film - 1'57", looped
For a while pornography might have been considered, theorised and experienced as revolutionary, but now, diluted by commodification, it has to be faced not as sensual immersion but as senseless indetermination. Pornography is the world around us: the pounding of mind-numbing images masquerading as fun and the endless urging to join the consumer festivities. So when Sturtevant reworks an entire advertising video in the form of deftly composed wallpaper, it's a killer.
A Sturtevant exhibition is always an event. An event that renegotiates the issue of representation, and sets it in motion. It opens up a double-bottomed space: inside there’s the double of language, the artwork and its replica.
But what interests her more in this digital age is the way values, and the hierarchies of reality and its representations, have been turned upside down. «My pieces,» says Sturtevant «reflect our cyberworld of excess, of fetters, transgression and dissipation. In the past the higher power was that of knowledge, intelligence, and truth. Nowadays the higher power is hatred and killing, while the mask of truth covers the dangerous power of lies.»
Sturtevant’s late work takes a frontal look at this all-embracing violence, and the fascination exerted by these shimmering realities. She foreshadowed this turn in art, its transformation into a segment of culture, swept up in its entirety by the mindless, dazzling ambience of simulacra: no longer a locus of creation, but a mere tape recording, an encoding and decoding, a tape magnetised by signs. She anticipated the advent of Warhol’s reproductive machine, the giddy intoxication with these serial signs, beyond falsification and sublimation, immanent in their own repetition: the cool world of the digital, which absorbs the real but cannot repress it. »¹
During more than twenty years, Sturtevant has lived and worked in Paris, she passed away in 2014. Her first exhibition at Air de Paris took place in 1998 and was entitled “Ça va aller“, the second “Blow Job“ was in 2009. She is one of the most influential artists of the twentieth century. She was awarded The Golden Lion award for Lifetime Achievement at the Venice Biennale in 2011. She has had numerous retrospective exhibitions including recently “STURTEVANT STURTEVANT“ at Madre, Naples,“Double Trouble“ at the Museum of Contemporary Art, Los Angeles, “Sturtevant: Double Trouble“, Museum of Modern Art, New York. “The House of Horrors (The Ghost Train)“ is part of the collection of Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris.
1- Stéphanie Moisdon, extracts from : Sturtevant Sturtevant, 2015.